Réseaux Sociaux : quel enjeu pour notre spécialité ?

24/09/2022
Text

Roberto Luigi Cazzato
Service d’Imagerie Interventionnelle, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg

Dans les dernières années nous avons assisté à une progressive augmentation de l’exploitation des réseaux sociaux dans le domaine de la communication médicale. Cela implique des enjeux majeurs compte tenu du contenu sensible qui peut être partagé ainsi que de ses implications éthiques, juridiques et sociales. A l’état actuel, la difficulté majeure est liée principalement à l’absence des recommandations ou de texte de loi spécifiques capables de règlementer les différents aspects critiques liés à la publication sur les différents réseaux sociaux. Cela laisse donc une large possibilité d’action aux différents professionnels de santé qui se lancent dans ce domaine. D’autre part il convient de noter que les réseaux sociaux représentent un outil très puissant pour communiquer avec le grand public. Par conséquence, cela va sans dire qu’une bonne et saine utilisation de ces moyens pourrait être bénéfique pour élargir la connaissance du grand public au sujet de certaines spécialités médicales émergentes, comme la radiologie interventionnelle. Par exemple, il n’aura échappé à personne d’entre nous que lorsqu’ on se retrouve à table avec des amis non-médecins et que l’on nous demande « tu fais quoi dans la vie ? », répondre tout simplement « je suis un chirurgien » renvoi tout de suite l’idée au grand public d’un médecin impliqué avec un « rôle central » dans la prise en charge du patient. En revanche, répondre « je suis radiologue » peut nous amener à des problèmes d’identification du rôle clinique incontournable que nous jouons quotidiennement dans la prise en charge du patient. Et pire, si par hasard on répond « je suis radiologue interventionnel », vous pouvez être assuré que dans un premier temps, dans la meilleure des hypothèses, on nous identifiera avec un radiothérapeute, et dans le pire des cas, on nous identifiera pas du tout, ce qui fera en sorte que toute la soirée à table continuera au tour de l’explication de ce que peut faire aujourd’hui un radiologue interventionnel.

Pour toutes ces raisons, en tant que radiologues, nous sommes dans l’obligation de communiquer au grand public notre rôle aujourd’hui incontournable dans la médecine moderne ; et dans cette perspective, l’utilisation des réseaux sociaux semble un très bon outil. Néanmoins, au vu du manque de règlementation et du contenu sensible de notre pratique, il conviendra être vigilant sur les différentes modalités d’utilisation des réseaux sociaux. Par exemple, l’identification du bon réseau social semble primordiale pour cibler le bon public. Communiquer à travers LinkedIn or Twitter nous permettra de toucher un publique plus « professionnel » par rapport à une communication établie à travers Facebook or Instagram, qui vise un public plus généraliste.

D’autre part, une communication institutionnelle établie par des sociétés savantes, pourrait assurer plusieurs avantages vis-à-vis des enjeux de ce type de communication « périlleuse ». L’implication des sociétés savantes pourrait assurer un contrôle de qualité reparti sur plusieurs sujets comme les créateurs du contenu, le directoire de la société d’organe concerné, ou le département communication de la société savante même, ce qui pourrait largement contribuer à réduire le risque d’accidents… D’autre part, l’utilisation d’une communication officielle pourrait permettre de mieux gérer des potentiels « conflits » générés par des publications sensibles et dont le contenu médical touche à la compétence d’autres spécialités médicales.  
Au total, la communication et particulièrement celle conduite sur les réseaux sociaux par les professionnels de santé s’est révélée être un outil très puissant. Néanmoins, comme tout outil puissant, il faudra en assurer une utilisation prudente et bien calibrée. Dans cette perspective, une implication directe des sociétés savantes pourrait se révéler une bonne stratégie pour atteindre les objectifs de communication nécessaires à mieux faire connaitre notre spécialité au grand public dans le respect de la confraternité médicale et du droit des patients.