Primovist, utilisation, indications et limites

01/10/2022
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Laurent Milot,

Service de radiologie diagnostique et interventionnelle, Hôpital Edouard Herriot, Hospices Civils de Lyon

 

Les pathologies du foie sont toujours plus nombreuses, nécessitant une détection et un traitement plus précoces. C’est dans ce contexte que ces dernières années ont émergé de nouvelles techniques IRM, telles que l’imagerie de Diffusion ou l’imagerie de quantification de la graisse, du fer et de la fibrose et la création de nouveaux produits de contraste hépatospécifiques, dont le PRIMOVIST.

Le Primovist c’est quoi, comment ça marche ?

Le Primovist est un produit de contraste IRM hépatospécifique, c’est-à-dire qu’il a un tropsime particulier pour les hépatocytes (1), médié par deux transporteurs, l’un qui transporte l’agent de contraste dans les hépatocytes et l’autre qui l’excrète dans les voies bilaires. 50% du produit transite dans le foie. Cette propriété est la pierre angulaire de l’utilisation du PRIMOVIST, en faisant son apport principal mais également sa complexité d’utilisation.

Un protocole particulier ?

La phase hépatocytaire du Primovist intervient précocement, dès 10-20 minutes, permettant de profiter des avantages de cette phase dans la durée d’un examen normal.

Certains ajustements sont nécessaires (2). Le produit se donne typiquement à une dose de 10 ml et doit être injecté à 1cc par seconde, ce qui a montré un avantage pour obtenir une phase artérielle de qualité. Lors de certaines phases artérielles, des artéfacts respiratoires peuvent apparaitre (3). Il est conseillé de réaliser des acquisitions multi artérielles. Concernant la phase tardive, un angle de bascule de 30% optimise le contraste hépatique. Il faut également ajuster la temporalité de la phase hépatocytaire à la fonction hépatique. Il faut attendre plus longtemps (30 minutes) en cas de dysfonction hépatique avérée (4).

Des choses à savoir pour lire les images ?

Du fait de cette phase hépatocytaire précoce, il faut bien comprendre que la cinétique de rehaussement du foie se trouve rapidement modifiée (2), et ce dès la phase d’équilibre. En effet, le foie commence à se gorger de Primovist alors que les vaisseaux continuent de voir le produit circuler. Ceci ne pose aucun problème lorsque l’utilisateur est habitué à ces images, mais peut surprendre au départ.

Quelles sont les applications du PRIMOVIST ?

Le bilan pré thérapeutique des métastases hépatiques :

Il s’agit probablement de l’indication la plus pertinente du PRIMOVIST. En effet, les métastases ne contenant pas d’hépatocytes, elles apparaitront noires sur un fond blanc (figure 1), devenant très faciles à détecter. L’utilisation conjointe de l’imagerie avec PRIMOVIST et de l’imagerie de Diffusion a montré des performances spectaculaires (5), que ce soit pour les lésions les plus larges ou les plus petites, qui étaient jusque-là un challenge insurmontable.  Cette combinaison trouve particulièrement sa place dans le bilan préopératoire des métastases colorectales, où l’exhaustivité est critique, car la chirurgie peut être curative.

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Figure 1 : Image en axial T1, phase hépatocytaire, 20 minutes après injection de Primovist. Exemple de deux métastases de cancer colorectal apparaissant en hyposignal sur fond de foie en très net hypersignal.

Les lésions hépatocytaires bénignes :

Là encore, le Primovist est très performant. En effet, les HNF, contrairement aux adénomes, montrent une captation importante du produit (6,7). Un point de sémiologie à comprendre est que la cicatrice centrale ne montre pas de rehaussement tardif car elle ne contient pas d’hépatocyte (figure 2). Il ne faut prendre ce signe pour une « atypie ». Il faut aussi retenir que certains adénomes peuvent montrer une captation, en particulier chez les patients présentant une stéatose hépatique, chez qui il faut rester prudent.

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Figure 2 : Image en axial T1, phase hépatocytaire, 20 minutes après injection de Primovist. Exemple d’une Hyperplasie Nodulaire Focale, apparaissant en net hypersignal, similaire voire un peu supérieur à celui du foie. Noter la cicatrice centrale en hyposignal.

Le CHC :

Le rôle précis du Primovist est encore sujet à débat (8,9). En effet, sa cinétique de contraste rend plus complexe l’interprétation lésionnelle. En revanche, il semble que de nombreux CHC ne montrent pas de captation hépatocytaire tardive, permettant de faire un diagnostic plus précoce. La manière de gérer ces lésions fait l’objet d’une recherche intense, et les mises à jour du référentiel LIRADS aideront les utilisateurs à mieux interpréter les différentes phases.

L’imagerie biliaire et de la fonction hépatique ainsi que l’utilisation comme biomarqueur (10,11) sont des applications prometteuses.

En conclusion, le Primovist est un produit de contraste hépatospécifique très performant. Une fois « apprivoisé », Il représente un outil de choix de l’arsenal des radiologues confrontés à l’évaluation des pathologies hépatiques.

Références :

  1. Planchamp C, Hadengue A, Stieger B, Bourquin J, Vonlaufen A, Frossard JL, et al. Function of both sinusoidal and canalicular transporters controls the concentration of organic anions within hepatocytes. Mol Pharmacol. avr 2007;71(4):108997.
  2. Ringe KI, Husarik DB, Sirlin CB, Merkle EM. Gadoxetate disodium-enhanced MRI of the liver: part 1, protocol optimization and lesion appearance in the noncirrhotic liver. AJR Am J Roentgenol. 2010 Jul;195(1):13-28
  3. Davenport MS, Viglianti BL, Al-Hawary MM, Caoili EM, Kaza RK, Liu PSC, et al. Comparison of acute transient dyspnea after intravenous administration of gadoxetate disodium and gadobenate dimeglumine: effect on arterial phase image quality. Radiology. févr 2013;266(2):45261.
  4. Khouri Chalouhi C, Vernuccio F, Rini F, Duca P, Tuscano B, Brancatelli G, et al. Hepatobiliary phase in cirrhotic patients with different Model for End-stage Liver Disease score: comparison of the performance of gadoxetic acid to gadobenate dimeglumine. Eur Radiol. juin 2019;29(6):30909.
  5. Vilgrain V, Esvan M, Ronot M, Caumont-Prim A, Aubé C, Chatellier G. A meta-analysis of diffusion-weighted and gadoxetic acid-enhanced MR imaging for the detection of liver metastases. Eur Radiol. déc 2016;26(12):4595615.
  6. McInnes MDF, Hibbert RM, Inácio JR, Schieda N. Focal Nodular Hyperplasia and Hepatocellular Adenoma: Accuracy of Gadoxetic Acid-enhanced MR Imaging-A Systematic Review. Radiology. déc 2015;277(3):927.
  7. Ba-Ssalamah A, Antunes C, Feier D, Bastati N, Hodge JC, Stift J, et al. Morphologic and Molecular Features of Hepatocellular Adenoma with Gadoxetic Acid-enhanced MR Imaging. Radiology. oct 2015;277(1):10413.
  8. Paisant A, Vilgrain V, Riou J, Oberti F, Sutter O, Laurent V, et al. Comparison of extracellular and hepatobiliary MR contrast agents for the diagnosis of small HCCs. J Hepatol. mai 2020;72(5):93745.
  9. Semaan S, Vietti Violi N, Lewis S, Chatterji M, Song C, Besa C, et al. Hepatocellular carcinoma detection in liver cirrhosis: diagnostic performance of contrast-enhanced CT vs. MRI with extracellular contrast vs. gadoxetic acid. Eur Radiol. févr 2020;30(2):102030.
  10. Araki K, Harimoto N, Kubo N, Watanabe A, Igarashi T, Tsukagoshi M, et al. Functional remnant liver volumetry using Gd-EOB-DTPA-enhanced magnetic resonance imaging (MRI) predicts post-hepatectomy liver failure in resection of more than one segment. HPB (Oxford). févr 2020;22(2):31827.
  11. Cheung HMC, Karanicolas PJ, Coburn N, Seth V, Law C, Milot L. Delayed tumour enhancement on gadoxetate-enhanced MRI is associated with overall survival in patients with colorectal liver metastases. Eur Radiol. févr 2019;29(2):10328.